Le 20 novembre 1945 fut le premier jour du procès de Nuremberg. Pour la première fois de l'histoire, un État souverain (l’État allemand, en l’occurrence) était sur le banc des accusés. Les deux qualifications de crimes contre l'humanité et de génocide furent citées. Ce qui signifie que furent retenues au procès, d'une part, les accusations de crime imprescriptible d'atteinte à la valeur et à la dignité de chaque individu humain ; comme, d'autre part, les accusations de crime de destruction de nations et de groupes ethniques.
Ce moment historique était l'aboutissement d'un long processus auquel ont pris une part active deux juristes polonais : Hersch Lauterpacht (1897-1960) et Raphaël Lemkin (1900-1959).
L'idée d'une justice internationale et, par suite, celle de la création d'une cour pénale internationale ont germé dans une réflexion sur les crimes de la Seconde Guerre mondiale. Le 20 octobre 1943, la Commission sur les crimes de guerre des Nations Unies a été créée et, en juin 1945, Hersch Lauterpacht a publié Une Charte internationale des droits de l'homme, ouvrage majeur établissant la nécessité de placer l'individu humain sous la protection d'un nouvel ordre juridique international mettant fin à l'omnipotence de l’État.
Avant cette avancée juridique majeure, il était possible de dénoncer des exactions étatiques – comme le firent les Britanniques et les Américains en 1915 au sujet de l'action des Turcs contre les Arméniens –, mais on ne pouvait pas les sanctionner juridiquement, puisqu'on tenait pour acquis que les États étaient libres de traiter comme ils l'entendaient ceux qui vivaient à l'intérieur de leurs frontières. Il est cependant vrai que, dès février 1945, à Yalta, Franklin D. Roosevelt, Winston Churchill et Joseph Staline avaient décidé que les responsables allemands seraient traités en criminels et jugés comme tels.
Hersch Lauterpacht n'était pas le seul à réfléchir à ces problèmes. Raphaël Lemkin, ancien procureur polonais, publia en 1944 un ouvrage intitulé (en traduction française) : Le Règne de l'Axe en Europe occupée. Le terme qu'il utilisa dans le chapitre IX de cet ouvrage pour qualifier les crimes commis contre les peuples était celui de génocide.
Ainsi, l'acte d'accusation adopté à Nuremberg au procès des grands criminels de guerre, le 8 octobre 1945, reprit les termes de la définition qu'en avait proposée Lemkin : « Extermination préméditée et systématique de groupes raciaux et nationaux parmi la population civile de certains territoires occupés, afin de détruire des races ou classes déterminées de populations et de groupes nationaux, raciaux ou religieux, particulièrement les Juifs, les Polonais, les Tsiganes et d'autres. »
Le droit international au XXe siècle a reconfiguré la souveraineté étatique en mettant au cœur des relations internationales un tribunal ayant le pouvoir d'infliger aux États et à ceux qui les gouvernent des sanctions imposées par des organes tiers.
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